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Si comme disait Alighiero Boetti “ la nature est une affaire obtuse ”, une insensée course vers la vie d'une réalité sans forme ni couleur, tout artiste qui désire aller en profondeur dans ce mystère à l'aide de sa pratique est obligé de faire face à cet énoncé inéluctable tôt ou tard. 

 

Pour ceux qui prennent le jeux au sérieux, il s'agit toujours de la même idée: créer un système, un monde où les découvertes et les merveilles de la vie peuvent se reproduire. 

 

Si la nature dresse une barrière à la compréhension, autant donc accepter le défi en recommençant par la matière même qui se manifeste à travers un vocabulaire quotidien. Il faut ainsi s'en remettre aux motifs les plus présents dans l'imaginaire commun et pourtant libres du poids de l'exclusivité des sentiments. 

 

L'univers de Markéta Šenkyříková-Lacroix est un lieu magique où une tache de vin et une galaxie en formation ont la même valeur et leurs dynamiques ont le même droit d'être étudiées. 

 

Un endroit où la transparence des choix et l'essentialité de moyens permettent aux gestes de résonner librement dans l'espace.

 

La question de l'essence n'est d'ailleurs rien d'autre que la nécessité d'aborder à nouveau la question de l'origine, de la création, et finalement la question de l'art. Un engagement dans lequel le geste doit forcement passer par un dépouillement, une sorte de réduction de la grammaire compositionnelle.

 

Dans toute l'oeuvre de MSL, je vois deux sentiments s'alterner et se compénétrer :

-d'un coté ce que je qualifierais comme une sorte de poétique de la résignation, une acceptation de l'impossibilité de pouvoir fixer la réalité dans une image figée, 

- de l'autre coté une volonté de plonger dans la matière pour mieux la comprendre, par un processus qui n'hésite pas à sectionner la réalité comme au travers d'un microscope. 

 

“Une extase de la matière ou un matérialisme extatique: un point dans l'oeuvre où la matière sort hors de soi pour être simplement ce qu'elle est ”. 

 

C'est ce que Federico Ferrari dit dans son manifeste pour un art essentiel, et ce que je ressens lorsque j'observe les dessins et les sculptures de MSL: des objets qui fourmillent de vie et qui refusent de rester inertes parmi la multitude d'objets existants. 

 

Ce pèlerinage de particules qui se déposent sur les surfaces à la recherche d'un état visible devient un délicat dialogue entre temps et matière, donnant comme résultat des objets fascinants, qu'on dirait avoir été métabolisés peu a peu, à travers des signes qui montrent un rythme primordial dans lequel on se reconnait sans hésitations. Implacable, incompréhensible, insensé. 

 

Ainsi est la vie, bien qu'elle soit rarement décrite de cette manière: une élégance qui ne pourrait pas se produire sans une certaine dose d'âpreté.

 

Le travail plastique de MSL semble croître dans ce terrain de réflexion, un lieu où le mystère, loin de se dévoiler, ne fait qu'augmenter. 

L'affaire continue à rester obtuse, pour le plaisir de nous tous.

texte par Luccia Seghezzi

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